Et c’est l’une des périodes les plus exceptionnelles à titre humain que j’ai pu vivre avec des hommes et des femmes qui étaient cadavériques, des 30 kilos, dans un état incroyable. Ils se remplumaient, reprenaient vie, littéralement, devant nos yeux. J’en ai encore la chair de poule, rien que d’y penser. C’était absolument extraordinaire.
Par exemple, les services de soins palliatifs n’accueillaient pas forcément à bras ouverts le public malade du Sida. Alors certes, il y avait quelques inquiétudes éventuelles des soignants, mais c’est pas forcément ça qui était le plus rédhibitoire. Ce qui l’était, c’était que pour éviter justement la contamination lors d’accidents, piqûres, etc. Il fallait conserver les traitements thérapeutiques de ce public pour que la charge virale soit indétectable, donc que ce soit quelqu’un qui ne puisse pas transmettre le virus. Or, comme on l’a évoqué, ces traitements sont extrêmement coûteux et donc ce n’est pas forcément le public le plus rentable et donc pas forcément le mieux accueilli. Et donc c’est comme ça qu’au départ on a créé une structure de soins palliatifs spécifique, et c’est comme ça qu’est né l’hôpital Jean Jaurès, à Paris.
En gros, beaucoup de choses du Groupe SOS sont nées en flânant, si je puis dire, avec ce public et ses déboires. Mais encore une fois, un traitement à la base, c’est quand même les trithérapies qui leur rendent la vie. Ce que je trouve le plus intéressant, ce n’est pas le vivre-ensemble, c’est s’aimer ensemble. C’est ça que je trouve plus intéressant.