11 avril 2023 • ACTUALITÉS
Aujourd’hui, les crèches associatives sont en déficit structurel permanent, ce qui menace à très court terme leur existence. A Paris, 75% des gestionnaires associatifs de plus de 100 berceaux et 65% des gestionnaires associatifs de moins de 100 berceaux sont déficitaires en 2021. Le président de la République a annoncé la création d’un service public de la petite enfance et 200 000 places supplémentaires. Alors que la stabilité du secteur associatif est loin d’être garantie dans le champ de la petite enfance et pour ne pas laisser plus de 95 000 enfants[1] et familles sans solution d’ici 2 ans, et pérenniser les crèches associatives qui gèrent 1/4 des places de crèches, les fédérations et organisations associatives publient ensemble un manifeste et des propositions pour assurer la sauvegarde des crèches associatives. Le Groupe SOS et Crescendo, qui assure depuis plus de 50 ans la création, le développement et la gestion d’établissements d’accueil de jeunes enfants apportent tout leur soutien à ce manifeste.
Quand le gouvernement s’attelle à penser un service public de la petite enfance accessible à tous en créant 200 000 places supplémentaires bénéfique pour l’ensemble des familles, et où il rappelle que chaque acteur qu’il soit public, privé lucratif ou associatif à toute sa place, a-t-il seulement conscience que le secteur associatif de la petite enfance est appelé à disparaître prochainement ?
Les crèches associatives représentent aujourd’hui plus de 22,8% des places offertes aux parents dans les modes d’accueil collectif, soit plus de 95 000 enfants accueillis. Les crèches garantissent une qualité de l’accueil à travers les différentes valeurs portées au sein de leur projet associatif au bénéfice des enfants et des familles : solidarité, primauté de la personne, inclusion, vivre ensemble, mixité, diversité, accompagnement des familles. Les crèches associatives, ce sont aussi des bénévoles et des professionnels engagés qui prennent en compte les besoins des enfants et la parole des parents pour favoriser leur bien-être et leur épanouissement.
Mais malgré les nombreuses alertes, le modèle économique des crèches associatives ne tient plus. Elles sont tiraillées entre deux partenaires, principalement les CAF et les communes qui ne sont pas en mesure de proposer des solutions pérennes pour stabiliser financièrement les crèches au bénéfice des enfants et des familles. Des difficultés récurrentes se sont donc installées de manière progressive d’une part avec la prestation de service unique (PSU) qui s’apparente à une tarification à l’acte et qui, bien que plus adaptée aux familles, met en péril tout le secteur associatif et d’autre part un cofinancement des communes qui ne suit pas.
Aujourd’hui, les crèches associatives sont en déficit structurel permanent, ce qui menace à très court terme leur existence. A titre d’illustration, à Paris, 75% des gestionnaires associatifs de plus de 100 berceaux et 65% des gestionnaires associatifs de moins de 100 berceaux sont déficitaires en 2021.
Cette situation financière est intenable et insoutenable pour les crèches associatives d’autant que les revalorisations de la PSU n’ont pas été suffisantes ces dernières années pour faire face à l’inflation et rendre plus attractif le secteur : 0% en 2019, 1% en 2020 et 2021, 5% en 2022, tandis que l’inflation a augmenté de 6% en 2022 et s’annonce à 4,3% en 2023 et le SMIC a évolué de 4,7% en 2022, puis 2% en 2023, avec une nouvelle hausse à prévoir d’ici la fin de l’année. A cela s’ajoute, les collectivités territoriales, et plus particulièrement les communes, qui ne revalorisent pas ou très peu les subventions attribuées au secteur associatif, de 0% à 1% seulement, elles aussi prises en étau par le contexte économique tout en favorisant leurs crèches publiques.
Au financement, s’ajoute un manque criant de professionnels dans la petite enfance ne laissant pas d’autre choix aux crèches associatives que de réduire l’offre faite aux parents pour garantir la qualité d’accueil et la sécurité des enfants et des professionnels (fermeture de places ou réduction de l’amplitude horaire). Tout comme le secteur social et médico-social, la petite enfance est confrontée à un manque d’attractivité : de nombreux postes vacants avec des difficultés à recruter des professionnels formés et qualifiés (peu ou pas de candidatures aux offres publiées); un recours de plus en plus important à l’intérim s’accompagnant d’un cout financier conséquent ; peu de candidats dans les organismes de formation. Ces difficultés se sont accentuées eu égard aussi au manque de reconnaissance des professionnels de la petite enfance, qui n’ont pas encore bénéficié de revalorisations salariales comme les autres secteurs des métiers de l’humain, et dont l’Etat renvoie à un dialogue en interbranche sans donner aucune visibilité sur les financements alloués dans le cadre de la future Convention d’Objectif et de Gestion entre l’Etat et la CNAF.
[1] Bilan du modèle de financement des EAJE par la PSU, CNAF, 28 juillet 2022 : 417 236 places d’accueil dont 22,8% gérées par des associations