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Améliorer l’accès aux soins pour les personnes trans

31 mars 2023 • ACTUALITÉS

En France, les personnes trans font face à d’importants obstacles à l’accès au soin : barrières économiques et administratives, manque de formation des soignant·es, discriminations dans le système de santé… La Haute Autorité de Santé rappelait en 2020 que « des enquêtes mettent en évidence qu’un tiers des personnes trans renoncent à des soins « à cause de préjugés du personnel soignant », et que 75 % ont déjà été mal à l’aise avec un médecin pour une raison liée à leur transidentité. Face à cette situation, le Checkpoint-Paris a développé une offre de soins spécialisée dans la prise en charge des personnes trans.

A l’occasion de la Journée internationale de visibilité transgenre le 31 mars, Louve Zimmermann, chargée de projets et médiatrice en santé trans au Checkpoint-Paris, nous décrypte les enjeux auxquels sont aujourd’hui confrontées les personnes trans.

Quels sont les obstacles auxquels sont confrontées les personnes trans dans leur accès au soin ?

« Ces obstacles à l’accès au soin sont d’autant plus graves que les personnes trans sont surexposées aux violences et à leurs conséquences sur la santé physique et mentale. Comme l’écrit Santé Publique France en 2021 : « Les lesbiennes, les gays et les bisexuel·les sont 2 à 3 fois plus souvent exposé·e·s à des violences psychologiques, verbales, physiques ou sexuelles que les personnes hétérosexuelles ; le phénomène est encore plus fréquent pour les personnes trans. Les discriminations et les violences subies ont des répercussions délétères et durables sur la santé des personnes, se traduisant par des indicateurs de santé mentale et de santé sexuelle dégradés, et des phénomènes de renoncements aux soins. »

Comment le Checkpoint-Paris s’engage-t-il pour un meilleur accès au soin des personnes trans ?

« Le Checkpoint-Paris est un centre de santé sexuelle à approche communautaire ouvert aux personnes LGBTI et travailleuses du sexe. Pour répondre aux inégalités sociales de santé touchant les personnes trans dans leur accès aux soins de transition, nous avons créé des parcours de santé trans visant à faciliter la prescription des traitements hormonaux, l’orientation vers des professionnel·les de santé et des associations communautaires partenaires ainsi que le suivi de la santé sexuelle et globale des personnes trans.

« Depuis l’ouverture de ces parcours en mars 2022, 68 personnes trans ont été suivies par les médecins et la médiatrice en santé du Checkpoint, dont un quart sans couverture sociale au moment où elles l’ont débuté.« 

 Ces parcours ont montré l’importance de s’appuyer sur l’autodétermination des personnes plutôt que sur un diagnostic psychiatrique, dans la lignée des avancées de l’OMS sur la dépsychiatrisation de la transidentité, ainsi que le rôle essentiel des médecins généralistes comme professionnel·les de premier recours et fil rouge des parcours de santé des personnes, comme le souligne le rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales de 2022.

La médiation en santé paire joue également un rôle important pour rassurer des consultant·es qui ont vécu des discriminations au sein du système de santé et les aider à se maintenir dans leur parcours de soin. Par ailleurs, l’approche globale de la médiation en santé permet d’aborder avec les consultant·es les aspects non médicaux de leurs transitions en proposant notamment de la navigation en santé adaptée à leurs besoins. En effet, les parcours de transitions sont très divers et doivent être individualisés : nous avons donc à cœur d’adapter l’offre aux besoins spécifiques de chaque personne. »

Quels sont les principaux leviers pour améliorer les conditions de vie et de santé des personnes trans ?

« L’offre de santé de qualité pour les soins de transition est rare et rapidement saturée. L’amélioration de la prise en soin des personnes trans nécessite déjà que de plus en plus de médecins généralistes renouvellent et débutent des traitements hormonaux : en étant formé·es par exemple par le ReST (Réseau Santé Trans), et en enrichissant la formation initiale de professionnel·les de santé sur la santé des personnes trans.

Cela nécessite aussi des déblocages institutionnels : facilitation de la primo-prescription hormonale par les non-spécialistes, meilleur remboursement des soins et fin du conditionnement de leur remboursement au numéro de sécurité sociale, qui met en danger la santé des personnes comme quand le frotti cervical est déremboursé après un changement d’état civil par exemple.

Il faut aussi travailler à une meilleure reconnaissance de la médiation en santé par les pair·es, à l’harmonisation de l’accès aux Affectations longue durée (ALD) et à celle du panier de soin pris en charge. Il est également important de faciliter et accélérer l’accès à l’Aide médicale d’Etat (AME) pour toutes les personnes qui en ont besoin dans une logique de santé publique. De plus, avec l’aide d’associations communautaires, il est nécessaire de produire de nouvelles recommandations de bonnes pratiques par la Haute Autorité de Santé.

« L’engagement des institutions publiques est crucial pour soutenir le travail des professionnel·les de santé. »

Enfin, la santé globale des personnes trans passe aussi par un engagement des politiques publiques et de tou·tes les professionnel·les du secteur médico-social pour garantir l’accès au logement, à la stabilité économique, à la régularisation et à l’ouverture des droits des personnes trans, en prenant en compte le cumul des facteurs de vulnérabilité : personnes trans migrantes, travailleuses du sexe, isolées socialement notamment. C’est par l’articulation entre soignant·es, médiateurs et médiatrices en santé et travailleurs et travailleuses sociales que nous pourrons vraiment avancer pour de meilleures conditions de vie et de santé des personnes trans. »

 

Bibliographie mobilisée

  • « Sexe, genre et santé. Rapport d’analyse prospective 2020 » de la Haute Autorité de Santé, 2020 ;
  • Nathalie LYDIÉ, « Ampleur et impact sur la santé des discriminations et violences vécues par les personnes LGBT en France », rapport de Santé Publique France, 17 mai 2021 ;
  • Simon JUTANT et Hervé PICARD, « Rapport relatif à la santé et aux parcours de soin des personnes trans », rapport pour l’Inspection Générale des Affaires Sociales, janvier 2022 ;
  • « Classification Internationale des maladies » de l’Organisation Mondiale de la Santé, 11e révision, entrée en vigueur le 1er janvier 2022.

 

Quelques ressources pour les professionnel·le·s

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